La psychothérapie jungienne et l’art d’apprivoiser le taureau (7): Oublier le taureau

Article mis à jour le 17/06/2024 | Zen et psychothérapie

 

 

Juché sur le taureau, l’enfant est de retour chez lui dans les montagnes.
Le taureau oublié, l’enfant reste seul sans rien faire.
Bien que le soleil du matin soit déjà haut, il rêve encore.
La corde et le fouet sont devenus inutiles.

 

« Juché sur le taureau, l’enfant est de retour chez lui dans les montagnes »

Le premier verset du sixième stade disait : « Sur le dos du taureau, je désire rentrer chez moi ». Mais, qu’est-ce que « rentrer chez soi » signifie vraiment ? Le moi-égo est en réalité le reflet du Soi sur l’écran du mental, un mouvement de fermeture par lequel cette image est prise pour ce qu’elle reflète. C’est un mouvement d’oubli de soi… qui est le reflet du mouvement d’éveil au Soi. Rentrer chez soi, c’est donc s’oublier soi-même… dans le bon sens.

Par conséquent, au septième stade, l’image ne se prend plus pour sa source. Tandis que nous cherchions le vrai Soi, le « moi » qui le cherchait a disparu. Cette disparition du « moi » qui cherche permet de ne plus être séparé du Soi. Devenir soi-même, c’est devenir le Soi même. À ce stade, le Soi n’est donc plus un objet de conscience mais devient la réalité de qui nous sommes. Nous sommes véritablement de retour chez nous.

« Le taureau oublié, l’enfant reste seul sans rien faire. »

L’échange accompli, le taureau et l’enfant ne font qu’un. Le taureau oublié, maintenant chez lui, dans sa solitude, ses montagnes, l’enfant est Un. Etre Un signifie être « non-deux », non divisé, et pourtant également être seul. Assis, il se sent lui-même sans se posséder, s’abandonnant au bonheur de la contemplation de ce qui est, il ne pense plus à chercher autre chose.

Le retour chez soi marque la sortie de l’illusion. Rien n’est en trop, rien ne manque. Il n’y a rien à faire. Nous donnons nous le droit de ne « rien » faire ? Être Soi n’est pas de l’ordre du faire. Lorsque l’on ne fait plus qu’un avec l’eau, est-il encore besoin de nager ?

« Sous le soleil du matin déjà haut, il rêve encore. »

Le lever de l’aurore a eu lieu, l’or de la conscience s’est extrait de sa gangue et est déjà haut dans le ciel. L’enfant, illuminé par le soleil a une claire vision de ce qui est. Au contact du réel, il a abandonné toute idée de réalisation. Son but… d’avoir un but a disparu. Peut-être rêve t-il d’en rester la ?

Cependant, le piège de ce stade est le désir de rester centré sur l’absolu dans la solitude de nos montagnes, sans plus entendre les sons qui montent de la vallée. Or, si s’apprendre soi-même, c’est s’oublier soi-même, s’oublier soi-même c’est s’ouvrir à toutes choses… Être Un, c’est être seul, mais dans une solitude ouverte. Il s’agit donc de revenir.

« La corde et le fouet sont devenus inutiles. »

Tous les outils utilisés jusqu’à présent sont devenus inutiles. Nous n’avons plus à lutter avec nos instincts, nos passions, nos désirs. Cela ne veut pas dire qu’ils ont disparu, mais que nous ne cherchons plus à échapper à qui nous sommes, ni à devenir quelqu’un d’autre. Toute technique est devenue inutile. Une fois le fleuve traversé, il ne sert à rien de porter la barque sur sa tête.

Nous n’avons plus à craindre de relâcher notre effort… puisqu’il n’y a plus rien à faire. Il reste juste cette conscience de soi qui n’a plus besoin de dompter le taureau… qui a tendance à nous éloigner du relatif pour nous fondre dans l’absolu.

Il n’y a qu’une réalité dont le taureau est un symbole.
Une fois attrapé le lapin ou le poisson,
Le piège ou le filet est devenu inutile.
Comme l’or extrait de sa gangue,
Comme la lune qui se lève au-dessus des nuages.
La lumière d’avant la création brille, sereine et pénétrante.

Patrick Bertoliatti

Souscription

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